Statement
Pour un voyageur, la ville s’offre à partir de points de vue. Alger présente ses collines à ceux qui arrivent en bateau. Brasilia expose ses symboles de pouvoir depuis son esplanade centrale. Quant aux villes occidentales, elles offrent aux regards des marcheurs des places, monuments et lieux pittoresques qui témoignent d’Histoires prestigieuses.
Les habitants de ces villes, eux, ont renoncé depuis bien longtemps à ce type d’image. Dans leur quotidien fragmenté et contrôlé, ils ne s’attardent généralement plus sur les paysages de leur lieu de vie.
J’ai passé mes premières années de photographe à chercher l’image de la ville entre ces deux positions. Au Brésil, en Algérie et en France dans les années 2000, j'ai photographié la cité en faisant le grand écart entre la vue d’ensemble et les constats d’un éclatement sans fin du quotidien dans les métropoles. Insatisfait, j’ai interrompu mon travail plusieurs années.
Celui-ci a repris en 2014, devant la Cité Céleste de Beni Messous, un bidonville de la banlieue algéroise. Ce lieu n’avait aucun point de vue à offrir et il ignorait l’organisation fragmentaire de l’espace. Le bidonville refuse l’aménagement, les espaces publics ou la patrimonialisation.
Ses habitants se méfient des urbanistes, même les mieux intentionnés. Ils sont conscients de la fragilité de l’endroit où ils vivent et des relations qu’ils y construisent. L’habitant du bidonville ne s’approprie jamais pleinement son lieu de vie. Pourtant, il s’y sent chez lui.
Mon travail aujourd’hui consiste à étudier attentivement cet attachement au lieu de vie. J’examine cette ville fragile, que ses habitants situent entre le souvenir du lieu d’origine et le désir de trouver sa place.
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Lotfi Benyelles - Biographie d'artiste au centre National des arts plastiques